Salon de peinture 2019 – Promenade sous les toiles

Tableau de Thierry Lozachmeur : Rebel

Pressée,  je le percute violemment en tournant le coin de la rue. Il se tenait là, comme un vigile surveillant je ne sais quoi.

Mes yeux essaient de croiser les siens, mais derrière ses lunettes il reste à distance. Alors, je fais un pas en arrière prête à poursuivre mon chemin mais quelque chose m’interpelle : sa posture droite dégageant une certaine élégance.

Un homme en gilet rose barré d’une chaîne en or retenant une montre à gousset. Il me paraît être d’un autre temps. Bizarre !

Quelque chose de rebelle transparaît dans son attitude et le contraste entre jean délavé ceinturé de cuir et le foulard noué autour de son cou jure avec sa casquette un rien coquine.

J’engage la conversation et à mon étonnement il ne me répond pas. Est-il un étranger perdu ici au coin de la rue ? J’observe sa main dans la poche et une chaîne, encore, cache  un secret.  J’essaie maladroitement quelques mots en anglais mais devant son mutisme, je renonce.

Mes pas de femme pressée me guident vers le centre culturel de l’Archipel où j’ai rendez-vous avec mes amis pour écrire à propos de la toute nouvelle exposition de l’été.

Il était là, cette fois ci sur un tableau accroché dans le hall d’entrée et toujours son air rebelle me toisait. Je compris qu’il avait juste eu l’envie de faire un petit tour en ville avant de commencer sa journée d’homme modèle exposé aux regards inquisiteurs  des visiteurs.

 

Deux tableaux d’Andrée DOUGUET : Explosion / Et demain ?

Une explosion vient de se produire, assourdissant encore la chute des pierres des immeubles alentours. Tout s’écroule, lentement, comme dans un rêve, un mauvais rêve, au ralenti, tout gris.

La poussière obscurcit les rayons du soleil qui tentent de se frayer un chemin dans ce chaos.

Autrefois, la petite venelle riante, fleurie, laissait entrevoir un petit coin tout bleu où les hirondelles virevoltaient comme de petites folles.

Maintenant, avec un sentiment d’accablement, en position repliée, la gamine et sa mère contemplent le désastre avec une question au bord des lèvres : Et demain ?

 

Tableau d’ Elzbieta BEAUJARD : Automne

Il était une fois …

Quoi ? Quoi ? réclamait l’enfant.

Quoi ? Quoi ? répliquait l’oiseau noir en croassant.

Et ben quoi ! Moi, je ne sais pas ce que je fais là. Il me semble que je me suis perdu dans cette forêt étrange. J’étais avec mon père et mes frères, joyeux, allant chantant le long du sentier ombragé.

Ma mère, à mi-mots, avait parlé d’un trésor insolite dans ce sous-bois et d’un clin d’œil elle m’a encouragé  à suivre mes aînés. Surprise !

J’étais le plus jeune,  pas plus haut que trois pouces,  et traînais les pieds sur cet interminable chemin où les arbres bleus naviguaient tels des radeaux sur des couches de mousses en surfant sur toutes les couleurs. Les poches pleines de petits cailloux  blancs ramassés en chemin ralentissaient la marche du garçonnet qui trébuchait de fatigue.

L’oiseau, noir de corbeau, perché, lui répondit : Quoi ? Quoi ? Encore toi !

L’arbre rouge droit comme  un totem se distinguait dans cette forêt bleue et rayonnait tel un phare sur le bord de la côte. Un phare en pleine forêt : étrange vraiment !

Quoi ? Quoi ? Ne savait que répliquer  l’oiseau noir sur sa branche,  perché.

Déçu, l’enfant revint sur ses pas.

 

Deux tableaux d’Isabelle D’ARBOUSSIER : Le clocher rose et Le val bleu

C’est par hasard que Matisse trouva le chemin du Val Bleu. Il eut envie de tirer le fil qui se torsadait  sous ses yeux pour y entrer.  Il pensa s’immiscer dans un conte et pour cela la chevillette chut quand il poussa la porte pour y pénétrer sur la pointe des pieds.  Il attrapa ce fil d’Ariane, d’un noir d’encre de Chine, épais comme un cordage. Cette ligne puissante  tracée telle un boustrophédon le promena de droite à gauche et de gauche à droite comme le laboureur traçant ses sillons dans son champ. Ses allers et retours  tricotaient inlassablement  des lignes entremêlées et parfois, une boucle accrochait un village tranquille, une forêt haut perchée, quelques maisons  ou bien un clocher au sommet d’une paroi rocheuse.

Le val se nichait dans un cocon d’ombre bleue, fraîche à souhait où il faisait bon se lover.

Après sa visite Matisse l’explorateur laissa derrière lui la ligne noire  enroulée, petite pelote de chanvre prête à se lancer à l’assaut du clocher rose du tableau voisin telle une infatigable conquérante.

Hélène.

Faucon cause

SALON DE PEINTURE 2019 à l’Archipel « Promenade sous les toiles »

Tableau « Automne » d’Elzbieta Beaujard

Capture

(Catalogue complet : copyright Archipel)

Point de départ : « Comme dans un conte, vous faites parler le tout petit oiseau noir bien tranquille sur sa branche en bas à droite »

Salut, vieille branche,

Tu ne sais pas quoi?

Il était une fois ma forêt…

Assieds-toi là,

Entre les peignes des sapins,

Tu démêles ta vie, tu te sens bien…

Il était une fois, disais-je,

Le jour où Paul Cézanne

S’est assis près de mon arrière-arrière-grand-père.

Il est venu peindre ICI.

Il a pris toutes les couleurs de l’automne

Et les a volées à la forêt.

Paul Sérusier et Paul Gauguin

Ne sont pas venus ICI,

Mais ils ont fait le même hold-hup

A Pont-Aven.

J’ai un ami pinson du Bois d’Amour

Qui me l’a raconté en passant.

Oh, tu sais, au milieu des sapins,

Je suis un tout petit oiseau,

Mais je me sens… S E R I N !

Je ne crains rien

Dans l’écrin serré des branchages…

Oh ….Non!

Cela ne va pas recommencer

Comme en 1874!

Ça suffit là, Elzbieta Beaujard,

Voleuse de couleurs!

Kodacolor humaine!

Je ne finirai pas en noir et blanc

Comme feu mon arrière-arrière-grand-père!

Oups! Elle m’a eu!

…Oh, merle, alors!

 

Par Géraldine Puireux

Rêve-errance

SALON DE PEINTURE 2019 à l’Archipel « Promenade sous les toiles »

D’après la toile « le Val Bleu » d’Isabelle d’Arboussier (catalogue complet : copyright Archipel)

val bleu.PNG

Point de départ : « Vous vivez dans ce village, et vous nous racontez »

 

Le Val Bleu, où je vis,

Est comme un rêve,

Un rêve bleu,

Un rêve à deux,

Une trêve pour les yeux.

Le village, sans âge,

Est un mirage aux doux rivages,

Qui se carapate dans les Carpates.

On se gainsbarre en Cappadoce,

Dans le bourg, qu’a pas d’os.

Nul sale gosse,

Point de négoce,

Interdit aux féroces.

Le pont fait des flons-flons,

Comme en Avignon,

Il y a des maquisards

Sans maquignons…

Dans le Val Bleu,

Tu te regardes dans les yeux,

Et tu peux tutoyer les cieux,

Comme avant toi, mille aïeux….

Aïe! … Tu m’as pincée,

je rêvais, crétin!

Comment ça, faut aller bosser à l’usine?

J’hallucine!

Mais je travaille, moi, môssieur!

Du chapeau…!

Chapeau bas!

Et ma démission,

La voilà ah ah ah ah ah ah ahhhhh

(Véronique Sanson, si tu nous regardes!)

Je tire mon rêve-errance,

Mon rêve-erran-an-ce……

 

par Géraldine Puireux

Promenade sous les toiles

Rêverie en forêt de Louis Lemee

Acrostiche

 

Lumière, éclat, rayons au travers des feuilles,

Enivre mes pensées, je rêve, j’existe,

Majestueux, je m’élève jusqu’au seuil,

Évaporé, sensation céleste qui persiste,

Emmène-moi en promenade sous les toiles.

 

Connexion de Xavier Cournac

Ariane, aide-moi! Jamais je ne pourrai sortir de ce labyrinthe, tout est construit, carré, fermé.. Un jeu de dentelles cache les dangers, fils blancs enchevêtrés, chemins tracés dans tous les sens pour mieux me perdre. Je réfléchis, je doute, mes neurones sont en fouillis, je frôle la folie. Ariane, aide-moi! Thésée est mon cousin, je dois rejoindre Icare, attends-moi!

 

Le principe d’incertitude de Gérard Machart

 

Le

Big one

Est arrivé, sourd,

Tout est brisé, lourd.

La Terre comme un ventre

Ouvert, absorbe l’humanité entière et digère.

Que restera-t-il de nos fracas?

Cette immunité qui faisait,

Nos joies, fiertés

Trop béates,

Rien.

Le 17/07/2019

 

Tableau de Thierry Lozachmeur

Rebel

 

Qui est cet homme?

 

Bonjour, vous venez de loin? J’ai l’impression de vous avoir vu quelque part, il n’y a pas si longtemps. Vous me faites penser à certains intellectuels, vous savez! Certains intellectuels un peu imbus de leur connaissances et de leur naissance, ces intellectuels issus de l’aristocratie ou le la grande bourgeoisie, qui voudraient se libérer de leurs chaînes et de leurs diktats et qui pour cela, s’acoquinent avec le bas peuple, le peuple commun, ceux qui sont un peu en marge de la bonne société, ainsi singeant leurs coutumes pour se donner bonne conscience.

Les gens comme vous, ont les moyens de tout se permettre, créer une nouvelle mode, changer la société en inventant de nouvelles lois, pourvu que cela soit dans leur intérêt. Félicitations! Vous avez réussi votre déguisement: une casquette de bon goût pour faire à la fois voyou et propriétaire, le foulard ample et riche pour montrer tout de même d’où vous venez, une paire de lunettes pour avoir l’air d’un prof, un monsieur qui sait. Bravo! La chemise qui dépasse du pantalon! Il faut faire un peu négligé et naturel. Ah! La petite veste cintrée sur un gilet sans manches, d’où sortent des chaînes, couteau ou montre? Montre à gousset, couteau suisse? C’est au choix. La main dans la poche pour montrer votre allure décontractée en accord avec votre Jeans bien coupé, ne manque plus que des tatouages sur vos mains pour faire le méchant motard.

Bon ! Allez! Salut! Je ne vous dis pas à la prochaine, amuser-vous bien!

 

Tableau d’Andrée Douguet

Et demain?

La violence est passée, tout ce qui pouvait tomber est tombé, reste les monceaux de gravats.Dans ce moment de répit, les habitants rescapés cherchent le calme, veulent sentir le bonheur de vivre, d’avoir échapper au pire, juste d’être en vie, ne pas penser, respirer, regarder en face de soi pour faire disparaître cette réalité insupportable. A force de regarder fixement dans la même direction, l’esprit s’évade, s’envole vers des lendemains lumineux, des rires, les cris des gamins qui jouent, l’esprit retrouve des souvenirs, des odeurs de cuisine, la vie simple. l’urgence est de vivre, respirer, rien que cela, vivre! Pour que demain existe encore et encore.

 

Gérard P

 

Je voudrais bien …

Au plus fort de la déprime : un cri craché, un matin de 2004

Je voudrais bien…
… Je voudrais bien ne pas croire aux fantômes…

Mais Lui, il est là, Il ne laisse pas le choix. Il m’a choisi comme d’autres, choisi en victime, parmi d’autres, avec d’autres…

Sa force : Nous ne nous connaissons pas. Anonymes. Solitaires. Tabous. Silencieux.
Taisons-nous, d’ailleurs !

Car si nous clamons notre envoûtement, on va nous accuser, ou nous envier…

car nous oserions « claironner » notre malédiction !
Je ne sais pas, pas toujours, que Tu es là, et c’est ce qui me donne ce répit, ce loisir échappatoire.


Cancer,

je Te hais de te foutre de mon Blues.

Loïc

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Aujourd’hui, nous avons la haine, la hargne, la gniaque. Et Lui rigole toujours.

Annie

juillet 2019

Publié avec l’autorisation de Françoise R.

Promenade sous les toiles (suite et fin)

Le principe d’incertitude de G. Machart

P1060021

Danger

                                                                      Terre brulée

Croûte terrestre brune

Coulée de lave volcanique

Cratère en fusion, sous pression

Le volcan se réveille, courons, fuyons

Le ciel se teinte de rouge

La terre est chaude

Le monde bouge

Réveillez -vous

Danger.

 

Promenade sous les toiles….(suite)

Connexion de Xavier COURNAC

P1060016

Je suis rouge ou blanc, peu importe…..rouge pour la colère ou blanc pour la paix ? Je pourrais être une tâche d’encre rouge qui s’éclate sur une feuille blanche, je pourrais être une peinture faite sur une grande toile posée à terre. On appelle cela de l’art moderne ……je pourrais être des taches de sang sur de la neige…….et bien  non, je suis un globule rouge ou blanc qui voyage dans vos veines pour que vous soyez en connexion parfaite avec vous même…….

 

Promenade chez Monsieur E.

SALON DE PEINTURE 2019 – « Promenade sous les toiles » – Archipel de Fouesnant

Oeuvre : Connexion, de Xavier Cournac

 

Réseau raisonnant

Blanc de crépine

Synapses crépitantes

Pensées en toucher-couler

Grenat sans grenade

Explosion sans fumée

Trous noirs de la pensée

Courbes qui filent droit

Me promener ici, Albert!

Précieux centimètres cubes à explorer

Mise en boîte crânienne

Machine à inventer

Musée vivant du neurone

Echaffaudage d’axiomes

Toile divine et animale

D’atome en atome

Qui palpite…

Comme le coeur d’un homme!

 

par Géraldine Puireux

Noyade en naïade majeure

SALON DE PEINTURE 2019 – « Promenade sous les toiles » – Archipel de Fouesnant

oeuvre : « L’eau qui danse » de Marie-Line Maze

Noyade

Mer ondulante

Ecume des vagues

Tu m’as emporté

Monstre sacré de la féminité

Comment pourrais-je donc me délivrer?

Même si je le voulais

Ô, rester t’admirer,

Outremer argenté, salé

Aquatique beauté,

Naïade…

!

 

par Géraldine Puireux